Ville sacrée, labyrinthe d’émotions, carrefour de spiritualités : Bénarès, également connue sous le nom de Varanasi, fascine et déconcerte à la fois.
Située sur les rives du Gange, elle incarne une Inde millénaire où le temps semble suspendu. Ici, les croyances se mêlent aux traditions, les rites anciens côtoient le quotidien, et chaque recoin respire la ferveur.
Cette cité sainte attire autant les pèlerins hindous venus chercher la rédemption que les voyageurs en quête d’authenticité. À Bénarès, le sacré n’est pas une abstraction, mais une réalité palpable à chaque instant.
De l’aube aux ténèbres, la ville vibre au rythme des mantras, des cloches et des cris de vie.
Au sommaire
- Une ville plus vieille que l’histoire elle-même
- Le Gange, fleuve de vie et de mort
- Les ghats : scènes vivantes d’un théâtre sacré
- Bénarès, la ville des temples
- Les ruelles de Bénarès : un labyrinthe d’âmes
- L’expérience sensorielle totale
- Les paradoxes de la ville sacrée
- Rencontres et spiritualité
- Bénarès autrement : initiatives durables et culture locale
- Quand partir et comment s’y préparer
- Conclusion : une ville qui vous habite longtemps
Une ville plus vieille que l’histoire elle-même
Selon la légende, Bénarès aurait été fondée par Shiva lui-même, ce qui en fait l’un des plus anciens lieux habités du monde. Des siècles d’histoire y sont enfouis, dans ses temples, ses ruelles et son atmosphère.
Il est dit que Varanasi existait déjà quand Rome et Athènes n’étaient que des villages. C’est cette ancienneté qui confère à la ville un caractère sacré indéfectible. Le promeneur curieux y sentira une sorte de vertige temporel, comme si l’Inde d’aujourd’hui dialoguait constamment avec son passé.
Chaque pierre, chaque escalier menant au fleuve raconte une histoire. En flânant le long des ghats – ces marches de pierre plongeant dans le Gange – on découvre une multitude de scènes : bains rituels, prières silencieuses, offrandes flottantes, ou encore cérémonies funéraires.
Le Gange, fleuve de vie et de mort
Le Gange est bien plus qu’un cours d’eau à Bénarès : il est le centre spirituel, le lien entre les mondes. Les hindous croient qu’y mourir et s’y faire incinérer permet de briser le cycle des réincarnations.
Chaque jour, des dizaines de corps sont brûlés sur les ghats crématoires, notamment à Manikarnika Ghat, sous le regard serein des brahmanes. Cette acceptation de la mort, vécue sans tabou, étonne et bouleverse.
Mais le Gange, c’est aussi le théâtre de célébrations : à l’aube, les barques glissent doucement dans la brume, emmenant les fidèles pour un bain purificateur. À la tombée de la nuit, l’Aarti illumine les berges de flammèches dansantes, de chants et de clochettes.
Quelques rituels à ne pas manquer :
- Le bain matinal dans le Gange au lever du soleil.
- L’Aarti du soir au Dashashwamedh Ghat.
- Les crémations traditionnelles à Manikarnika Ghat.
- Les offrandes de fleurs et de bougies à faire voguer sur l’eau.
Les ghats : scènes vivantes d’un théâtre sacré
Bénarès compte près d’une centaine de ghats, chacun ayant une fonction spécifique : prière, bain, crémation, méditation, yoga…
Le ghat Assi, plus paisible, est prisé par les étudiants et les artistes en quête d’inspiration. Tandis que Dashashwamedh est l’un des plus animés, propice à l’observation de la vie indienne dans toute sa diversité.
Ces marches de pierre ne sont pas de simples lieux de passage, ce sont des espaces de vie, de rencontre et de spiritualité. On y voit les barbiers raser les crânes des défunts, les musiciens jouer du sitar, les vaches se mêler aux sadhus.
Parmi les ghats les plus emblématiques :
- Dashashwamedh Ghat : le plus spectaculaire.
- Assi Ghat : plus tranquille, ambiance étudiante.
- Manikarnika Ghat : dédié aux crémations.
- Harishchandra Ghat : également lié aux rites funéraires.
Bénarès, la ville des temples
La cité sainte regorge de temples, souvent cachés dans les ruelles étroites, parfois majestueux, toujours habités par une atmosphère vibrante. Le plus sacré est sans doute le Kashi Vishwanath, dédié à Shiva, où l’accès est strictement contrôlé.
Les non-hindous ne peuvent entrer dans certains temples, mais l’énergie qui s’en dégage est palpable même de l’extérieur. La ferveur des fidèles, la musique des clochettes, les parfums d’encens… tout cela crée une ambiance hypnotique.
Parmi les lieux notables :
- Kashi Vishwanath Temple : cœur spirituel de Bénarès.
- Durga Mandir : reconnaissable à sa couleur rouge.
- Tulsi Manas Mandir : dédié à l’auteur du Ramcharitmanas.
- Bharat Mata Temple : rare temple dédié à l’Inde elle-même.
Les ruelles de Bénarès : un labyrinthe d’âmes
Se perdre dans les ruelles tortueuses de Varanasi est une expérience incontournable. Ces allées étroites, souvent bordées de vaches, de scooters et de petites échoppes, forment un microcosme vivant et bruyant, mais profondément humain.
On y découvre une Inde loin des clichés touristiques : artisans au travail, familles en prière, enfants qui jouent au cricket avec des bouts de bois. C’est aussi là que se trouvent les meilleurs lassis et les chaï les plus savoureux.
Ce réseau de ruelles permet de ressentir la pulsation intime de la ville, bien différente de ses grandes artères. À chaque coin, une surprise : un autel, un graffiti sacré, un marchand de fleurs ou un brahmane en méditation.
L’expérience sensorielle totale
Bénarès ne se visite pas, elle se vit. Tous les sens y sont sollicités : les odeurs d’encens, les sons des mantras, la chaleur du soleil, le goût sucré du chaï, les couleurs vives des saris.
Chaque journée dans la ville ressemble à une plongée dans un monde parallèle où le sacré imprègne tout, même les détails les plus triviaux.
À vivre absolument :
- Goûter un chaï masala fumant en regardant le soleil se lever sur le Gange.
- Se faire faire un tatouage au henné dans une ruelle.
- Acheter un sari ou une écharpe en soie de Bénarès.
- Assister à un concert de sitar improvisé près d’un temple.
Les paradoxes de la ville sacrée
Bénarès est un concentré de contrastes. D’un côté, la dévotion intense, les chants religieux, la spiritualité omniprésente ; de l’autre, la misère, les détritus, les ruelles sales et les odeurs fortes.
Ce contraste entre beauté et rudesse forge l’identité unique de la ville. Il faut du temps pour apprivoiser Bénarès. Elle ne cherche pas à séduire, elle impose son rythme, elle bouscule les repères.
On peut en sortir ébloui, bouleversé, parfois choqué. Mais jamais indifférent. Ceux qui y retournent le font pour retrouver une vérité brute, une Inde nue, sans fard.
Rencontres et spiritualité
À Varanasi, les rencontres sont fréquentes et souvent marquantes. Les sadhus, moines errants vêtus d’orange, partagent parfois une parole ou un sourire. Les étudiants, curieux, abordent les étrangers pour pratiquer leur anglais.
Les pèlerins, venus de tout le pays, offrent des récits bouleversants de foi et de quête spirituelle. Et certains voyageurs y trouvent eux-mêmes une forme de méditation, de recentrage.
Que l’on soit croyant ou non, Bénarès nous invite à nous interroger sur le sens de la vie, sur la mort, sur la transcendance.
Bénarès autrement : initiatives durables et culture locale
Au-delà de la spiritualité, la ville bouge. Des initiatives écologiques voient le jour pour lutter contre la pollution du Gange. Des artistes locaux créent des spectacles mêlant théâtre et dévotion, et la jeunesse s’organise pour moderniser l’image de leur cité.
Des cafés culturels émergent dans les quartiers proches d’Assi Ghat, attirant les jeunes et les voyageurs à l’écoute d’une Inde contemporaine. On y trouve du Wi-Fi, des livres, et des débats animés sur l’avenir du pays.
À découvrir :
- Les écoles de musique classique hindoustanie.
- Les librairies alternatives des ruelles sud.
- Les associations nettoyant les ghats avec les bénévoles.
- Les ateliers de soierie artisanale.
Quand partir et comment s’y préparer
La meilleure période pour visiter Bénarès va d’octobre à mars, quand les températures sont plus clémentes. Les mois d’été peuvent être étouffants et la mousson rend les ruelles glissantes.
Il est conseillé de prévoir des vêtements modestes et confortables, ainsi qu’un certain lâcher-prise mental pour accepter les imprévus. L’Inde, et surtout Bénarès, se vit plus qu’elle ne se contrôle.
Conseils pratiques :
- Évitez l’eau du robinet, même pour se brosser les dents.
- Privilégiez les guesthouses proches des ghats pour l’immersion.
- Faites appel à un guide local pour les premiers jours.
- Apprenez quelques mots d’hindi pour tisser des liens.
Conclusion : une ville qui vous habite longtemps
Bénarès est une épreuve, une révélation, un voyage intérieur. Elle n’offre pas le confort des lieux formatés, mais elle vous transforme. Elle dérange, elle émerveille, elle enseigne.
Certains y perdent pied, d’autres s’y trouvent eux-mêmes. Mais tous s’accordent à dire que rien ne peut préparer à l’expérience de Varanasi.
C’est là, dans cette ville envoûtante où le sacré côtoie la poussière, où le fleuve charrie les âmes et les souvenirs, que le cœur de l’Inde bat plus fort.