A la découverte d’Honfleur

A la découverte d'Honfleur

A deux grosses heures de Paris par l’autoroute, on arrive dans Honfleur par le bocage normand, au milieu des vaches indifférentes aux superstructures futuristes du Pont de Normandie. Passés les faubourgs, les granits des anciennes demeures, qui ont fait le bonheur de tous les peintres qui ont hanté les lieux (et Dieu sait qu’il y en a eu, d’Eugène Boudin à André Hambourg), dégagent une atmosphère unique, faite d’Histoire, de mer et de marins, et d’un je ne sais quoi de désuet qui fait le charme d’Honfleur.

Quelle que soit la météo, la ville séduit. Les couples romantiques comme les familles, les seniors comme les juniors trouvent toujours dans les dédales des ruelles des sujets d’étonnement, d’admiration, de réflexion, et de rêve. En arrivant, si vous êtes venus là pour flâner un peu, tournez tout de suite à droite, par le Quai de la Tour, et utilisez le parking du Bassin du Centre (attention, l’été, les places sont chères…). La promenade se fait au pas, le nez au vent, l’œil aux aguets et l’esprit ouvert.
Vous êtes au cœur de la vieille ville, blottie autour du Vieux bassin dessiné par Duquesne au XVIIème siècle.

L’histoire d’Honfleur

En fait, Honfleur apparaît dans des documents dès le XIème siècle, et pendant la guerre de Cent ans, joue déjà un rôle notable. Il faut dire que sa situation stratégique en fait un bastion d’importance pour contrôler l’entrée du l’estuaire de la Seine, le fleuve royal. Au XIVème, Charles V élève des fortifications, ce qui n’empêchera pas la cité de tomber aux mains des anglais et l’ancienne église Sainte Catherine d’être détruite… pour notre plus grand bonheur si l’on considère la merveille qu’ont réalisée les charpentiers de marine pour la reconstruire. Une double coque de navire inversée, aux grandes poutres de bois transversales, sous laquelle le recueillement est de rigueur. Les jours de marchés, c’est tout un monde bruyant et sympathique où les produits du terroir le disputent aux étals de fleurs, légumes, poissons et charcutailles diverses.

A la fin du XVIème siècle, les marins de Honfleur ont la bougeotte. Champlain, venu de Brouage, part avec ses vaisseaux vers le Canada, et ces expéditions aboutissent à la fondation du Quebec en 1608. Un XVIIème qui s’éveille, et qui va voir de grandes transformations de la ville. On démantèle les fortifications sur ordre de Colbert, crée le Vieux Bassin actuel, et les pierres des murailles serviront à élever des greniers à sel en vieille ville, qui font notre joie aujourd’hui.

Au XVIIIème, c’est la grande période du commerce avec les Antilles, et les chantiers navals tournent à plein rendement. Enfin, au XIXème, les pré-impressionnistes de “l’Ecole de Honfleur”, emmenés par Boudin et Dubourg, donnent à la ville un statut de ville où l’art s’épanouit et se sent bien.

Il faut dire que tout ici est prétexte à ravissement.

St Léonard & Vieux Bassin

Face à la sortie de la rue de la Ville, on tourne à gauche sur le Cours des Fossés, on dépasse la Médiathèque et l’Office du Tourisme, on arrive à une petite place surplombée par l’église Saint-Léonard, et ornée d’un ancien lavoir ravissant du XVIIème, que les fantômes des lavandières du temps jadis viennent hanter les nuits sans lune.

L’église

L’église, détruite pendant la guerre de Cent Ans, fut reconstruite à la fin du XVème. Le portail flamboyant témoigne encore de l’art des artisans médiévaux. A l’intérieur, on est accueilli par des coquilles de bénitiers énormes rapportées par les marins honfleurais. On s’attardera sur les statues de bois de saints patrons, et notamment celle de Saint Léonard, patron des prisonniers.

Le Vieux Bassin

Il faut redescendre par la rue Cachin jusqu’à la rue de la République, et redescendre vers le vieux bassin. A droite, la vieille ville, avec l’église Saint-Etienne, qui héberge le musée de la Marine (fermé en hiver, mais magnifique) et les quais en pavés de pierre où les talons-aiguilles sont proscrits. A gauche, les façades d’ardoise du Quai Sainte-Catherine se parent l’été de drapeaux et de petites décorations pour le plaisir de l’œil. Gardez-le (l’œil) quand même à un niveau raisonnable, et admirez les vieux gréements amarrés là, et les multiples objets souvenirs des boutiques du port auxquels il est difficile de résister.

Vous arrivez à la Lieutenance, vieille sentinelle du XIème où le conseil municipal se réunissait au XVIème siècle, et dont le beffroi aujourd’hui disparu sonnait le couvre-feu. De 1684 à la Révolution, c’était le logis attitré du Lieutenant du roi. La statue de la Vierge qui surplombe la porte est un don d’Anne d’Autriche, et veille sur les marins qui s’embarquaient là pour des courses lointaines depuis 1643. Le grand Champlain partit de là en 1608 découvrir le Québec, et une plaque et un buste remémore ce haut fait. De l’autre côté du vieux bassin se dressait jusqu’en 1808 la Tour Carrée, reliée à la Lieutenance par une chaîne qui bloquait l’entrée du port.

La vieille ville

Par la rue des Lingots, redescendez vers la rue de l’Homme de Bois, qu’il vous faudra parcourir entièrement si vous voulez vous laisser griser par la profusion d’objets de tous poils pour décorer votre intérieur. N’oubliez pas de faire halte à « L’Œil du Chat », au n°13 (ça porte bonheur) si vous cherchez un bouquin introuvable ou un livre de vacances. Bernard Felli, le maître des lieux, a réuni une collection de livres anciens et récents très impressionnante (et encore, on n’en voit qu’une partie…).
Un peu plus haut dans la même rue se trouve le musée Eugène Boudin, dans lequel on peut passer des heures à rêver devant Boudin, bien sûr, mais aussi Monet, Jongkind, Courbet, Vallotton, Hambourg et Dufy, pour ne citer qu’eux.

La Rue Haute

Par l’un des escaliers exigus qui descendent entre les maisons, rejoignez la rue Haute, où vous pourrez choisir un restaurant pour le soir (à moins que vous ne préfériez dîner en vieille ville), ou chiner chez les antiquaires. Les maisons Satie abritent un hommage vibrant au compositeur né ici-même en 1866, et grand ami d’Alphonse Allais. Celui-ci, qui surnommait le musicien « Esoterik Satie », le côtoyait au « Chat Noir », où Satie était pianiste. Parcourez ce musée insolite écouteurs aux oreilles et découvrez l’homme, sa fantaisie, sa musique, et son époque.

Honfleur, une ville d’art

En débouchant de la rue Haute, vous rejoignez la Lieutenance. Le tour est fait. Il vous reste à découvrir les multiples facettes de Honfleur, qui recèle encore tellement d’autres trésors… Dommage cependant que les galeries de peintures l’emportent par leur nombre sur les commerçants de quartier. Essayez par exemple de trouver une charcuterie ou un traiteur pour y acheter un pâté ou un jambon de pays… La peinture règne en maître sur Honfleur, et c’est justice. Nombre d’artistes y ont posé leur chevalet pour être pénétrés de la douceur Normande.

Notre-Dame-de-Grâce

S’il vous reste un peu de temps, remontez en voiture, et grimpez par une petite route tortueuse que vous trouverez à la sortie de Honfleur sur la D 34 jusqu’à Notre-Dame-de-Grâce. C’est une minuscule chapelle au milieu des arbres, construite en 1600 sur l’emplacement d’une autre de 1023 disparue au XVIème siècle, où sont venus prier Champlain et les futurs Quebecquois, les Terre-Neuvas et tant d’autres partis en mer. Les murs sont couverts d’ex-votos émouvants, plaques de marbre et maquettes de navires, et sur les plafonds, des tableaux rappellent les marins sauvés par leurs prières à Notre-Dame-de-Grâce.

En sortant de ce lieu émouvant, contournez le carillon extérieur, et allez admirer le panorama. Toute la ville est à vos pieds, ainsi que l’estuaire de la Seine. Le soleil se couche, il ne vous reste que le temps de vous préparer pour le dîner…

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